L’Europe, malade de maccarthysme

En octobre dernier, le centre scientifique américain a déclaré qu'agissant par l'entremise de Sputnik et RT la Russie serait en train d'imposer sa suprématie médiatique à travers le monde. Récemment, la commission aux affaires étrangères du Parlement Européen a avalisé le projet de la résolution selon laquelle la Russie mènerait une guerre d'information contre l'Union Européenne c'est pourquoi les Européens sont censés créer un service anti-propagande.

 

Et voici arriver encore une nouvelle information : la veille des débats à la session du Parlement Européen, Andrew Foxall, expert auprès du Centre de Recherches Henry Jackson Society du parlement britannique, a déclaré qu'il faudrait tirer au grand jour tous les contacts des sujets britanniques avec les représentants des autorités ou médias russes en vue « d'améliorer dans l'Occident la connaissance de la nature du régime russe ».

 

Vadime Gorshénine, président du Conseil d'Administration du holding médiatique Pravda.ru a livré son commentaire sur cette drôle d'initiative de l'expert anglois :

 

« Eh bien, le diagnostic du patient européen est on ne peut plus clair : l'Europe est frappée d'un mal terrible qui a déjà contaminé l'Amérique des années 50. C'est le maccarthysme.

 

Le 23 septembre 1950, le Congrès des Etats-Unis fit voter l'Internal Security Act de McCarran qui eut même raison du veto présidentiel. Cet acte statua sur l'institution d'un nouveau service sur le contrôle des activités subversives et antiaméricaines. Il fut également chargé de mettre à jour et mener l'enquête sur les organisations communistes.

 

Vers 1950, un système des poursuites médiatiques à engager à l'encontre des contestataires fut également mis sur pied. En été 1950, le rapport « Canaux rouges »n sur l'infiltration communiste à la radio et télévision fut publié dans l'hebdomadaire pro-maccarthyste « Contre-attaque ». le rapport mentionna 151 noms des artistes que l'on somma de démissionner ou renier leurs activités pro-communistes.

 

La moindre contestation politique recevait immédiatement le label d'anti-américanisme. Les maccarthystes se sont mis à organiser des pogroms des sièges sociaux des syndicats ; ils licenciaient les employés et les fonctionnaires indésirables. A leur tour, les autorités publiques furent soumises à des purges sommaires ce qui provoqua l'apparition des listes proscriptives : au cours des premiers mois des poursuites engagées, 800 personnes furent mises à la porte, suivies par 600 qui demandèrent leur retraite de leur propre chef.

 

Les maccarthystes n'omirent pas de passer au peigne fin les universités : ils y répudiaient les professeurs et organisaient les bûchers des « mauvais » livres. Ils obtinrent la supervision du Ministère de la Justice et de la Cour Constitutionnelle.

 

En 1954, ils firent voter une nouvelle loi - « L'acte de 1954 sur le contrôle des communistes ». Selon ce texte, le parti communiste fut déclaré illégal et privé de tous les privilèges et droits accordés à d'autres partis politiques.Qui plus est, la loi frappa les communistes d'interdiction de sortir à l'étranger et fixa 14 traits propres aux porteurs de la doctrine communiste.

 

Vous n'avez plus qu'à considérer à la lumière de ces faits les déclarations de M. Andrew Foxall du centre Henry Jackson Society du Parlement de la Grande-Bretagne : « En Grande-Bretagne, nous avions vu certaines personnes faire leurs éloges à Poutine, déclarer leur soutien à la Fédération de Russie à propos de sa politique en Ukraine. D'autres avaient entrepris des voyages à Moscou et autres sites pour prendre part à des événements organisés par le Kremlin et ses acolytes. Encore plus nombreux ont été ceux qui se sont produits sur les chaînes de télévision de propagande russe ».

« Si ces gens touchaient des honoraires pour leurs prestations, c'est qu'ils prenaient l'argent du Kremlin par ce fait même établissant des liens entre leurs organisations et Moscou », prétend l'auteur.

 

« En premier lieu, les activistes, les journalistes et les politiciens doivent mentionner les liens pro-russes des personnes physiques et des partis de tout type ; il se doit aussi de mettre publiquement en doute la confiance à prêter à ces gens et à ces organismes. En deuxième lieu, il nous incombe de dresser un schéma récapitulatif pan-européen de tous les liens personnels et organisationnels entre les politiciens des ailes gauche et droite et leurs collègues russes ».

 

Foxall croit qu'aujourd'hui, quand les mouvement de la gauche et de la droite se renforcent en Europe, il sied de « percer le secret des sources de leur financement ».

 

En outre, « les parlements de toute l'Europe doivent apporter des amendements dans la législation en vigueur ou faire voter de nouvelles lois obligeant les politiciens à faire des compte-rendus sur toutes leurs apparitions dans les médias aussi bien que faire état de toute rémunération touchée. Les chercheurs, les experts et tous les autres spécialistes doivent s'évertuer vers l'amélioration de leurs connaissances sur la nature du régime russe ».

 

Revenons à la période de la bacchanale maccarthyste et citons quelques noms des plus connus inclus dans la liste noire :

 

Julius et Ethel Rosenberg, communistes, agents secrets soviétiques ;

Aaron Copland, compositeur ;

Stanley Kramer, réalisateur ;

Robert Oppenheimer, physicien, « père de la bombe atomique » ;

Charlie Chaplin, comédien, scénariste et réalisateur ;

Albert Einstein, physicien, créateur de la théorie de la relativité...

 

Il semblerait que l'Europe soit en train de « reprendre le flambeau » pour reconstituer ces listes. En fait, on pourrait très bien se ficher royalement de ce qui est en train de se passer avec les citoyens de l'Europe « libre » : c'est que nous nous vivons dans un autre pays qui ne serait pas enclin à emprunter le chemin de la démence européenne.

 

Je crains autre chose. J'ai peur de la réponse symétrique en Russie : je suis sûr que les partisans d'une telle initiative seraient légion.

 

Sans opposition - et on se moque du fait qu'elle se fait subventionner par les donations occidentales - nous ne pourrons aller de l'avant de façon efficace.

 

Comment avons-nous réussi à faire bâtir un droit législatif des plus progressifs à travers le monde ? Cela s'est fait grâce à la critique ce qui nous a donné comme résultat une législation tellement bien élaborée que peu de gens peuvent la critiquer à l'échelle internationale en nous accusant d'être des « sous-développés ».

 

Et voici que maintenant c'est moi que l'on fait souvent porter le chapeau pour mon appartenance aux « faucons » du grand journalisme qui vous dis que les mesures européennes peuvent avoir des retombées néfastes dans notre espace de la politique intérieure. Je me répète : il nous faut une opposition.

 

Et je m'étonne du silence de notre opposition qui n'en parle pas tout en observant les mesures entreprises actuellement à l'encontre de la Russie.

 

Aurait-elle complètement perdu la boule ? Serait-elle tellement stupide tout en essayant de se faire passer pour un phare d'idées intellectuelles ?

 

J'ai bien peur que oui. Notre opposition a tellement désappris à réfléchir et à calculer les initiatives à prendre que maintenant quand le couperet peut tomber sur sa propre tête, elle ne se trouve pas les forces de donner son jugement critique sur les décisions prises à l'Occident, car « l'Occident est infaillible ». Quelle auto-humiliation, convenez-en !

 

Quant à vous, vous êtes-vous fait votre propre idée là-dessus ?