FRANCE

Le progrès technologique dans l'aviation civile rend inutile le déplacement de l'aéroport de Nantes à Notre-Dame des Landes

L'un des arguments majeurs des partisans du transfert de l'aéroport de Nantes à Notre-Dame des Landes, ce sont les nuisances sonores que provoqueraient le survol des avions au-dessus de Nantes-centre et de son agglomération (notamment les communes de Rezé, Bouguenais et Saint-Aignan-Grandlieu dans la banlieue sud). Pourtant, le progrès technologique rend ces nuisances de moins en moins importantes et diminueront encore dans l'avenir, rendant inutile le transfert des aéroports implantés près des villes, estime l'ACNUSA, l'autorité administrative indépendante de contrôle des nuisances aéroportuaires, dans son rapport annuel 2016, qui vient de paraître.

 

Cette autorité confirme ainsi la justesse des arguments des opposants au transfert de l'aéroport nantais - et de ceux qui doutent de la pertinence du transfert des pistes d'Orly, qui s'annonce très coûteux.

 

Dans son rapport, l'ACNUSA explique longuement les progrès réalisés en matière de bruit dans l'industrie aéronautique. Et pour cause : le bruit, c'est une perte d'énergie, donc de carburant, donc d'argent. « Depuis la fin des années 1990, le bruit des avions a été divisé par deux. Et on estime que l'empreinte sonore de chaque nouvelle génération d'appareils est inférieure d'au moins 15 % à celle qu'elle remplace. En outre, presque partout, en dépit de l'augmentation du trafic, les territoires couverts par les PGS [plan de gêne sonore] pourraient diminuer.

 

Toujours dans le même documents, l'ACNUSA affirme, au sujet du déplacement des pistes d'Orly - projet qu'elle juge illusoire : « La première leçon à tirer est que la situation des riverains s'améliore et continuera de s'améliorer même si le trafic doit encore augmenter. (...) Dépenser plusieurs milliards pour déplacer un aéroport (ou ses pistes !) dans le seul but de mettre fin à un niveau de nuisance qui n'existera plus dans vingt ou trente ans ne peut pas être regardé comme raisonnable ». Les mêmes propos peuvent être appliqués au projet aéroportuaire de Notre-Dame des Landes.

 

Nombre de candidats à la présidentielle, gagnés par la raison ou échaudés par la résistance des habitants, c'est selon, veulent l'abandonner. C'est le cas de Mélenchon, Marine le Pen, Benoit Hamon notamment. Emmanuel Macron privilégie comme d'habitude le vide programmatique et ne se prononce pas - même si plusieurs de ses alliés locaux (Le Drian, Auxiette, Jean Arthuis...) sont pour, tandis que d'autres sont contre (le député nantais François de Rugy par exemple). François Fillon a réaffirmé ce 27 mars dans Ouest-France, en marge de sa venue pour un meeting électoral à Nantes, sa volonté de mener à bout le projet - qui coïncide avec celle de ses soutiens politiques locaux.

 

 

L'ACNUSA met en demeure le Préfet de Loire-Atlantique de réviser le plan de gêne sonore de l'aéroport de Nantes Atlantique

 

Comme le bruit des avions s'amenuise avec le temps et le remplacement des vieux appareils par de plus récents, l'ACNUSA demande que les plans de gêne sonore (PGS) suivent le progrès technologique. L'autorité souhaite «  que soit examinée au moins tous les deux ans la pertinence des prévisions (trafic, procédures de navigation aérienne, infrastructures...) ayant servi à l'établissement du PGS ».

 

Or, à Nantes, le Préfet se fait quelque peu tirer l'oreille. Et pour cause ! Il est important que le PGS soit le plus étendu possible, afin de justifier le discours politique partagé par les élus de droite et de gauche (UMP, UDI, PS, PCF sont pour le transfert de l'aéroport) selon lequel l'aéroport dérange, qu'il est dangereux etc., sachant que la plupart des grandes villes du monde sont survolées par des avions (l'hyper-centre ou l'agglomération, avec des trajectoires qui passent souvent au-dessus de quartiers bien plus densément peuplés qu'à Nantes sans que cela ne pose de problème localement, ni aux responsables politiques, ni aux populations concernées.

 

Pour la troisième année consécutive, donc,  « L'ACNUSA demande à l'Autorité préfectorale compétente de mettre en révision le plan de gêne sonore de l'aéroport de Nantes-Atlantique dans les délais les plus brefs. »

 

Il se trouve en effet que les procédures d'approche et de départ de l'aéroport ont été modifiées. En 2012 justement, l'ACNUSA donnait son avis sur les projets de révision des départs conventionnels et de création de départs RNAV (GNSS). Encore un progrès technologique. Il s'agit d'une procédure publiée d'approche aux instruments qui permet de s'affranchir des moyens de radionavigation au sol (LOC, Glide, VOR, NDB et DME), qui permet notamment de supprimer à moyen ou long terme les balises au sol, et donc les coûts de maintenance associés.

 

Mais pas seulement. Dans son avis, qui est favorable, l'ACNUSA « apprécie le fait que les procédures GNSS deviendront obligatoires pour les avions équipés, car elles sont beaucoup plus précises et sont donc un facteur de réduction des nuisances pour les populations survolées par le resserrement des trajectoires et la limitation des survols de la ville de Nantes qu'elles autorisent ».

 

 

Vols d'avions bruyants la nuit : à Nantes ce sera fini à l'automne 2017

 

En novembre 2016, l'ACNUSA donnait cette fois son avis sur un projet de restriction du trafic nocturne à Nantes-Atlantique, à partir de la saison aéronautique IATA d'hiver 2017, qui commence au 29 octobre 2017. Le scénario retenu était le suivant : « interdiction de 22 h 30 à 23 heures pour les avions ayant une marge cumulée inférieure à 8 EPNdB et de 23 heures à 6 heures des avions du chapitre 3 ayant une marge cumulée inférieure à 13EPNdB », l'EPNdb étant la mesure effective du bruit perçu, qui permet de classer les avions par classes de bruyances - plus elle est basse, et plus ils sont bruyants.

 

Cette interdiction porterait sur 83 vols soit 3,7% du trafic nocturne, essentiellement du trafic fret et charters, avec un impact économique de 100.000 €, négligeable dans le budget total de l'aéroport. Il n'a pas été envisagé de les rétablir dans la plage nocturne, ni par des avions moins bruyants, ni en reclassant la flotte d'avions bruyante à la marge de la période d'interdiction. L'ACNUSA relève que « cette restriction constitue une mesure protectrice pour les populations à moyen terme (5 ans) en garantissant la non-augmentation de vols d'aéronefs présentant une marge acoustique faible. Associées aux travaux, les compagnies aériennes ont semblé pouvoir s'adapter rapidement ». L'autorité a donné un avis très favorable à la restriction envisagée.

 

 

La révision du PGS de l'aéroport de Nantes-Atlantique bloquée pour justifier le projet de Notre-Dame des Landes

 

Toutes ces raisons font que le PGS de l'aéroport de Nantes-Atlantique doit absolument être révisé. Mais dans son rapport, à la page 83, l'autorité relève le blocage politique - au détriment des habitants de la Métropole nantaise : « Depuis 2014, l'Autorité, constatant que les trajectoires réalisées ne sont plus en adéquation avec celles qui prévalaient lors de l'élaboration du plan de gêne sonore de l'aéroport, demande la mise en révision de ce dernier. Le préfet s'y est toujours refusé, au motif que la décision concernant le transfert de la plate-forme vers Notre-Dame-des-Landes était toujours en attente et qu'il ne fallait pas préjuger de l'avenir. L'ACNUSA persiste dans sa position, car il n'est pas normal de maintenir des personnes dans des conditions de bruit qui pourraient leur être épargnées en attendant une hypothétique décision de transfert. »

 

Encore un argument des opposants au projet qui se vérifie. Et qui permet de constater que les partisans du transfert à Notre-Dame des Landes n'en ont rien à faire de la situation des riverains, qui peut être améliorée dès maintenant. Car elle ouvrirait la boîte de Pandore en prouvant que l'aéroport de Nantes-Atlantique, situé à quelques kilomètres du centre-ville nantais est très bien à sa place et doit y rester.