Les pertes de l’Occident en cas de la rupture finale avec la Russie

La chancelière allemande Angela Merkel continue de prôner l'introduction des nouvelles sanctions contre la Russie, à cause de sa position sur la Syrie. Cette information a été fournie par Frankfurter Allgemeine Zeitung. Merkel veut inclure ce point dans l'agenda de la nouvelle réunion du Conseil Européen prévue le 20 et le 21 octobre prochain. C'est qu'elle aurait le plus grand mal du monde à s'entendre sur sa fixation non pas seulement au niveau de la Communauté, mais même au sein de son propre parti. En même temps, le président Obama lui a promis son soutien là-dessus, mais seulement si la chancelière réussit à obtenir le satisfecit parmi ses collègues du Vieux-Monde.

 

Il a été noté que les sanctions peuvent toucher l'aviation et les questions corollaires à la défense de la Russie.

 

André Klimov, sénateur, adjoint au président de la Commission des affaires étrangères de la Haute Chambre du Parlement de la Fédération de Russie, a commenté cette actualité en toute exclusivité pour Pravda.ru :

 

Pravda.ru. L'Occident que peut-il faire concrètement dans le domaine de l'aviation et de la défense ? L'Europe va-t-elle soutenir ces sanctions ?

 

A.Klimov. Je ne voudrais pas formuler des recommandations irréfléchies, directes ou indirectes, à nos opposants pour canaliser leurs efforts dans ce domaine. Tout ce que je peux suggérer, serait utilisé contre nous parce qu'ils lisent et analysent tout ce que l'on dit. Donc je voudrais l'éviter. Ca c'est mon premier point. En deuxième lieu, nous avons beaucoup de variantes à l'étude parce que même ladite Allemagne dépend étroitement de nos projets en commun dans le domaine des hydrocarbures, à ne citer que ça.

 

Cependant, à envisager les mesures des représailles, nos contre-sanctions ne seraient forcément pas dans le même domaine qu'entendent utiliser nos partenaires. Je pourrais pointer leur autre talon d'Achille que nous avions déjà évoqué à maintes reprises, au tout début de toute cette histoire : le survol de la Russie. C'est qu'il y a beaucoup de transporteurs aériens qui font usage de notre espace en économisant des sommes faraoniques. Ceci est intrinsèquement lié aux intérêts des dizaines, voire de centaines de milliers de passagers y compris en provenance de l'Europe Occidentale à destination de l'Asie du Sud-Est.

 

A supposer que nos autorités réagissent de façon adéquate, imaginez un peu l'effet escompté. Cela entraînerait des gains énormes des compagnies de transport aérien des Emirats, à ne citer qu'eux, tout en causant de très graves préjudices aux intérêts financiers des transporteurs français, allemands et autres. Ceci est l'évidence même. Je ne sais s'ils sont vraiment intéressés à concocter tout leur gloubi-boulga.

 

Il est également à rappeler, à tout hasard, que 40 % de pièces détachées de Boeing - et surtout tout ce qui a trait au titanium - est fabriqué en Russie. C'est que je ne recommanderais pas aux pays occidentaux de continuer ce petit jeu. Parce que si l'on répond de façon asymétrique, il leur en cuira plus que sérieusement !

 

Et enfin, le plat de résistance. Je ne sais ce que Merkel s'imagine là-bas, mais je sais pertinemment qu'aujourd'hui Mogherini essayait de calmer le jeu en serinant qu'aucune proposition concrète sur les sanctions n'est à l'étude. Ca c'est de l'information officielle ! Par contre, les propos que vous me citez ne sont basés que sur des rumeurs colportées par un périodique allemand. Mes idées à moi sont basées sur une information fiable, en harmonie avec les communiqués officiels de Madame Mogherini, responsable de toute la politique extérieure de l'Union Européenne. Sa déclaration de ce jour atteste clairement qu'aucune sanction concrète à l'encontre de la Russie n'est envisagée.

 

Pravda.ru. Selon le représentant officiel du Ministère des Affaires Etrangères de Russie Maria Zakharova, les représentants des Etats-Unis auprès du Fond Monétaire Internationale et de la Banque Mondiale doivent bloquer tout transfert des fonds destinés aux programmes avec participation de la Russie. Quelle peut être notre réponse ?

 

A.Klimov. Je ne sais si une telle consigne a été déjà donnée ou non. Zakharova en parle. Donc, éventuellement, il y a déjà du concret là-dessus... Mais il est à dire que les Américains ne dissimulaient même pas qu'ils voulaient nous attaquer sur le terrain financier. Ils ne manquent pas à leur parole. Aujourd'hui, non seulement les autorités américaines ont formulé une telle directive à l'attention des banques américaines, mais aussi à toutes les banques du monde collaborant avec l'Amérique ce qui comprend une quantité astronomique d'organismes. Ils sont tous censés fermer leur coopération avec la Russie.

 

L'administration sortante de Monsieur Obama veut réussir à nuire au maximum à la Fédération de Russie. Mais il serait déplacé de répondre à toutes ces actions américaines en portant atteinte à nos relations avec les pays de la Communauté Européenne, le Japon, la Corée ou d'autres Etats. Ce ne serait ni judicieux, ni correct.

 

Il est impossible de nier que, dans le domaine financier, les Américains sont aujourd'hui les plus gros joueurs. C'est pourquoi leur répondre de façon symétrique, léserait à nos propres intérêts. Mais je ne veux pour autant aider les Américains à comprendre où l'on va porter le fer. Notons au passage que nous avons pourtant de tels moyens à notre disposition.

 

Qui plus est, j'ai comme un pressentiment qu'après la fin des soubresauts de l'administration Obama, on passerait vite l'éponge sur tous les engagements actuels des Etats-Unis avec leurs partenaires européens. La raison est simple : tout ce qu'à l'heure actuelle, la Maison Blanche essaie d'entreprendre contre la Russie, frôle concrètement la démence. Cela n'avait cours même du temps de la « guerre froide ». Cela relève plutôt d'une réaction émotionnelle. Et, comme de bien entendu, dans les affaires d'État les émotions ne portent pas bon conseil.